La question peut sembler idiote : le rôle du veilleur n'est-il pas justement de porter à la connaissance d'autrui une information ? Si l'information est un élément stratégique, il semble donc évident que plus un veilleur dit de choses intelligentes (comprendre : plus il porte à la connaissance d'autrui des informations pertinentes), mieux c'est.
Et pourtant. Il s'avère qu'il peut être parfois difficile de dire certaines choses. Cette barrière peut se situer à deux niveaux :
1. Au niveau du veilleur lui-même.
2. Au niveau du bénéficiaire de la veille.
Concernant le premier point, il s'agit d'abord de la question de l'identification de l'émetteur d'une information : doit-on donner suffisamment d'informations qui permettraient d'identifier un internaute dans la vraie vie ? Est-ce que c'est souhaitable ? J'aurais tendance à dire qu'il n'y a pas de règle générale, et qu'il est de la responsabilité du veilleur de juger, au cas par cas (voir d'ailleurs la récente charte éthique des études web, signée par le PDG d'AMI Software et le coprésident de l'Adetem).
S'il s'agit de rumeurs infondées, il faudra évidemment identifier son auteur au plus tôt afin de mettre en place une stratégie de réponse adaptée. S'il s'agit d'une critique produit, cibler le profil du consommateur est important, etc. Reste ensuite à savoir tracer la frontière entre devoir d'information et respect de la vie privée... Même si rien n'empêche ensuite le destinataire de la veille d'aller faire un petit tour sur Google une fois le vilain identifié.
Tout dépend de la politique du commanditaire et de son approche du web ; si pour lui, le web est un espace de dialogue et d'échanges, pas de problème. En revanche, s'il perçoit le web comme un espace dangereux et incontrôlable (ce que certaines déclarations politiques ne risquent pas d'arranger), souvent par méconnaissance des nouveaux territoires d'expression, ça peut se gâter : qui me dit que le blogueur qui ne faisait qu'user de sa liberté d'expression ne risque pas de se retrouver, dans certains cas, l'objet des foudres d'un quelconque service juridique, qui ne se sera pas préalablement renseigné sur l'existence de méthodes plus "soft" ?
Concernant le second point, outre le fait qu'il est toujours plus facile d'entendre ce qui nous plaît (comme on lit plus facilement les articles de journaux qui nous confortent dans notre point de vue), il est également possible que le destinataire lui-même "censure" certaines des informations qui lui sont transmises, et ce pour plusieurs raisons, et qui peuvent être imputées (mais pas toujours) à un manque de culture de l'information :
- Ménager les susceptibilités en interne ("Oulah, t'as vu la e-reputation de F. Lefebvre ? nan on peut pas envoyer ça comme ça, c'est pas possible..."),
- se protéger soi-même ("Ah bon ? seulement 4 retweets pour ma campagne de com' à 2 millions ? Hem..."),
- garder une information dans le but de conquérir le monde, car l'information n'est-elle pas (à plus ou moins long terme) source de pouvoir ? ("Tant que le service machin ne sait pas ça, ça me laisse une longueur d'avance sur le service truc au sujet du projet bidule"),
- sûrement d'autres qui ne me viennent pas spontanément à l'esprit.
Bref, tout ça fait appel, à mes yeux, à plusieurs paramètres : l'éthique, la connaissance de la valeur d'une information, et le rapport culturel à l'information. Une équation dans laquelle les professionnels de l'information (en particulier en matière de sensibilisation) ont un rôle central à jouer !
Bref, tout ça fait appel, à mes yeux, à plusieurs paramètres : l'éthique, la connaissance de la valeur d'une information, et le rapport culturel à l'information. Une équation dans laquelle les professionnels de l'information (en particulier en matière de sensibilisation) ont un rôle central à jouer !