26 nov. 2010

La carte et le territoire (1)

Pardon pour le titre, c'était trop facile... Point ici de dissertation littéraire, mais plutôt un petit précis de cartographie virtuelle, première partie.

Cartographier un territoire, à quoi ça sert ? Ca sert à se repérer, à savoir où aller.  A représenter des données sur un support en les simplifiant afin de permettre une compréhension rapide et globale d'un environnement complexe. Un peu l'antithèse d'un Powerpoint de l'armée américaine quoi...

Comme dans beaucoup d'autres domaines, le web 2.0 a apporté son lot d'innovations dans ce domaine (en excluant la question de la géolocalisation, qui est encore autre chose) : 

- En matière de cartographie augmentée du territoire réel (comme une carte IGN, mais avec plein de fonctions utiles ou pas), avec le bien connu Google Earth (dans le même genre, il y a aussi NASA World Wind, moins connu, Wikimapia - qui marche très mal, ou... Map World pour nos amis chinois). 

Idéal pour savoir si la mer en face de l'hôtel 2 étoiles à Roswell-sur-Gougnon est vraiment bleu turquoise ou plutôt vert-algue :) Même qu'on peut aussi s'en servir pour essayer de retrouver l'Atlantide, se baigner dans des piscines ou plein d'autres trucs (comme traquer les contribuables soupçonnés de fraude fiscale...)

- Concernant les cartographies plus classiques, les Mappy, Openstreetmap et consorts (c'était juste pour ne pas continuer à faire de la pub pour Google...) ont plutôt une vocation utilitaire : Par exemple, comment aller de Jaunay-Clan à Néons-sur-Creuse sans prendre l'autoroute ? Des fois, ça peut aussi servir d'alibi pour envahir un pays par contre.

- Les cartes peuvent aussi servir à raconter des histoires, à mettre en scène une information pour la rendre plus intéressante et plus claire (voir le très bon site PopulationData), dans l'esprit du journalisme de données, cette nouvelle forme de journalisme au sujet de laquelle la France a quelques kilomètres de retard...

Mais les cartes ne servent plus seulement à représenter des territoires physiques ou des informations s'y rapportant. Elles peuvent également servir à représenter des territoires numériques, ce qui sera l'objet de la suite de ce billet !

15 sept. 2010

Le RSS c'est comme Chuck Norris, ça ne peut pas mourir

Après l'annonce de la fermeture du vénérable Bloglines (mon premier agrégateur, snif), lancé en 2003 et propriété d'Ask.com, on annonce un peu partout que c'est le début de la fin du lecteur RSS, voire carrément du RSS tout court. Argument renforcé par la chute du trafic de Google Reader (-27 % en un an).

C'est oublier que le RSS, c'est d'abord une technologie, un format standard (donc compatible, donc adoptable par un écosystème). Et on ne peut pas tuer une technologie. Prenons Twitter (au hasard) ; hé bin le RSS, c'est justement un des moyens mis à disposition de l'internaute pour suivre l'actualité de son compte.

Le véritable changement se situe en fait davantage au niveau des usages : c'est la consécration des réseaux sociaux, de l'approche horizontale de la consommation d'information. Le filtrage automatique laisse la place au filtrage humain. 

Mais ! Il y a quelques raisons pour lesquelles le lecteur RSS reste, à mon sens, indispensable. Et ce tant au niveau de la pertinence des résultats, qu'au niveau des usages (surtout) que les réseaux sociaux ne permettent pas (et là je parle en tant qu'internaute lambda, pas en tant que veilleur. Dans ce dernier cas, les arguments sont encore plus nombreux) :

- Je ne me vois pas suivre sur Twitter ou être ami sur Facebook avec tous les auteurs de blogs et sites d'infos que je suis via mon Netvibes (oui, j'utilise Netvibes et j'assume...). Des fois je sais pas qui c'est, des fois j'ai pas envie d'être leur pote, etc. Certains espaces, j'y vais juste pour m'informer, pas pour subir du journalisme LOL de la part des gens qui sont derrière ou leurs états d'âme.

- Même si je suis sur les réseaux sociaux des gens qui potentiellement ont les mêmes centres d'intérêt que moi, je n'ai malheureusement pas encore trouvé mon clone. Il y a toujours une part importante de "déchets" de la part des membres de mon réseau, des trucs publiés qui ne m'intéressent absolument pas. Via un lecteur RSS aussi, mais j'ai l'impression que le taux de déperdition est moins élevé (mais je me trompe peut-être !)

- Et surtout, s'informer uniquement via les réseaux sociaux, ça suppose d'être rivé à son écran 24h/24, 7j/7. Je sais que grâce à la technologie de nos jours c'est plus simple mon bon monsieur, mais bon. Il suffit de pas être rivé sur sa timeline et hop ! l'info est passée et vous l'avez pas vue. Et y'a plus qu'à aller la chercher (si tant est qu'on sait qu'elle existe !). Alors qu'avec un lecteur de flux, tout est agrégé, stocké, et les infos attendent sagement d'être lues.

C'est un peu comme dire que Twitter va remplacer les blogs : on compare des choses qui ne se ressemblent pas. Enfin ce n'est que mon humble avis...

5 sept. 2010

Un guide pratique de la e-réputation à l'usage des entreprises - et contre exemple

Il y a quelques semaines, Amine et Amal, auteurs du Digital Reputation Blog, m'ont fait l'honneur de pouvoir écrire quelques lignes à l'occasion de la parution d'un guide pratique collaboratif sur l'e-réputation à l'usage des entreprises.

Avec, dedans, une belle brochette de professionnels de la veille et de l'e-réputation (Frédéric Martinet, Gautier Barbe, Aref Jdey, etc. etc.) qui se sont essayés à un (difficile) exercice de synthèse sur les questions suivantes :

- E-réputation : de quoi parle-t-on ?
- Quels enjeux pour les entreprises dans le web social ?
- Comment adapter les valeurs de l'entreprise aux valeurs du web social ?
- Quels sont les dispositifs nécessaires pour mettre en oeuvre une stratégie web social ?
- Etc.

Ironie du sort, il se trouve en plus que depuis quelques jours toute la pertinence de mettre en place une stratégie de e-réputation se trouve parfaitement illustrée par... une agence d'e-réputation, récemment arrivée sur le marché et qui, manifestement, aurait tout intérêt à lire ce guide. Ca vaut son pesant de retweets...

 

12 juil. 2010

Le Time fait le grand écart

La tendance au retour au payant de la presse en ligne se confirme. Après l'annonce par Robert Murdoch de sauver le Times des griffes de l'ogre Google, le Time Magazine (celui-ci sans "s" puisqu'il s'agit de l'hebdomadaire américain) annonce carrément qu'il se casse du web.

Certes, le site vitrine du magazine est toujours là, mais les articles sont maintenant accompagnés de la mention suivante :

http://www.time.com/time/specials/packages/article/0,28804,1991933_1991952_2002543,00.html

En gros, ce sont les deux extrêmes : soit on se procure la version papier, soit on télécharge la version iPad. Exit le reste.

La version iPad coûte 3,99 dollars. La tablette connaît certes un beau succès aux Etats-Unis (3 millions d'exemplaires vendus), et je ne connais pas les chiffres de fréquentation du site tel qu'il fonctionnait avant, mais tout ça me paraît un tantinet risqué.

Certes, l'Ipad est excellent pour lire les journaux, mais pour espérer compenser la perte des lecteurs de la version web, les projections de vente ont intérêt à être sacrément bonnes. En plus, il n'est pas dit que les lecteurs web ne se tourneront pas vers un concurrent direct, lui toujours accessible gratuitement (même si à ce train-là il ne vas pas en rester beaucoup)...


Mais l'autre avantage de l'Ipad, c'est qu'il rend très difficile la duplication de contenus (il est quasiment impossible de faire un copier-coller sauvage), une marque de fabrique du logo à la pomme ; les éditeurs restent maîtres de leurs contenus (voir le modèle iTunes).

Ce n'est que mon humble avis, mais je me dis que la stratégie du journal consiste peut-être à conserver un temps les deux versions pour, à terme, ne garder que la version Ipad.

Bref, tout ça pour dire que si ça continue, on va devoir se trimballer avec cinquante terminaux différents en fonction de ce qu'on va vouloir lire ou faire. Plus inquiétant encore est cette tendance au repli sur soi des médias en ligne, qui est bon pour leur portefeuille mais pas pour la démocratie.

Ce dernier point, j'essaierai d'y revenir dans un prochain billet, qui sera disponible sur ordinateur ET sur Ipad, parce que c'est mieux (et que toute façon je gagne pas de sous avec).

28 juin 2010

De la dure condition du métier de veilleur


Un billet un peu décalé, puisque ça va parler boulot, et plus précisément des conditions parfois difficiles dans lesquelles un veilleur doit l'exercer. Bah oui quoi, veiller c'est pas facile tous les jours. 

Le veilleur a la tâche gratifiante d'écouter les gens parler, ce qui lui permet d'apprendre plein de trucs (plus ou moins utiles) et d'être au courant de ce qui se passe dans le monde. Comme il bosse beaucoup, au moins ça lui permet de ne pas utiliser tout son temps libre à lire le journal, ce qui est quand même pas mal.

Le revers de la médaille, c'est qu'il faut tout écouter. Dans la vraie vie, on a pas (toujours) ce problème, suffit de dire au relou d'aller se faire voir. Mais là, c'est comme si on était dans un bar, avec un calepin, et qu'il fallait prendre note de tout ce que les gens disaient... Vous voyez le tableau quoi.

Mais bon c'est comme ça. Ca permet de côtoyer plein de gens différents, aux centres d'intérêt des plus... variés (même constat pour le degré d'intelligence). Bref on voit plein de trucs. Et c'est parfois affligeant.

Comme je rédige ce billet hop comme ça, je n'ai évidemment aucune capture sous la main, seulement j'aimerais dresser le podium des sites les plus affligeants niveau commentaires, le genre de trucs que quand je les vois tomber dans mon lecteur de flux, je sens que je vais passer une bonne journée.

- Prix "Caverne à Trolls" : Le Post.fr.
- Prix "www.mylife" : Doctissimo.fr.
- Prix de groupe "Navrance collective" : les Skyblogs pour l'ensemble de leur oeuvre.

Bien sûr, vous pouvez aussi proposer les vôtres. 

Et comme y'a des trucs, ce serait vraiment dommage qu'ils tombent dans l'oubli, je propose à mes collègues du VeilleLab (et aux autres) de créer un endroit où on pourrait entasser tout ça. On pourrait même l'inaugurer au prochain pot, quand il viendra...

22 juin 2010

Une console portable pour lire le journal


Il fallait s'y attendre ; après tout, on joue bien sur les téléphones portables... Le boss de Nintendo, Satoru Iwata, a annoncé que la prochaine portable du constructeur (la 3DS, celle qui promet de la 3D sans lunettes) sera capable, via sa connexion sans fil, de "récupérer automatiquement des articles de journaux et de magazines" auxquels l'utilisateur se sera abonné. Et ce, même lorsque la console est en veille.

Pour l'instant, aucune information n'a filtré, que ce soit sur les journaux et magazines concernés (on peut imaginer un partenariat entre le constructeur et des groupes de presse) ou sur la façon dont l'information sera présentée (un espèce de dashboard ? un truc ressemblant à un lecteur RSS ?).

Pour info, la DS permet déjà la lecture d'ebooks (bon courage pour les yeux), notamment au travers d'un partenariat avec Gallimard et, au Japon, elle donne également des  informations pratiques (notamment pour les transports), en coopération avec les acteurs concernés.

"Arrête de jouer à la console ! Mais maman, je joue pas, je lis le journal..."

15 juin 2010

Le manga pour sauver la presse ?

D'un côté une presse traditionnelle qui s'effondre face à la concurrence du web et le vieillissement du lectorat. De l'autre un engouement qui ne se dément pas des jeunes pour les mangas, peut-être l'un des rares créneaux du papier à engranger des bénéfices considérables.

Constat évident, mais qui a germé dans l'esprit de certains pour donner naissance à une nouvelle forme de médias : les mangas... informatifs ! 

Lancé par la société KaBA Net en octobre dernier, le site Manga no Shimbun (grossièrement "Manga Newspaper") couvre l'actualité internationale, la culture, les faits divers (bref, tout ce dont traite un journal classique) à travers ses planches, noir et blanc ou couleurs, généralement sur deux pages max. Il y a même une application iPhone / Android ici.

Le site emploie quand même une centaine d'artistes, qui produisent en moyenne entre 10 et 15 planches par jour. Bon c'est pas du temps réel, et on est très loin de l'exhaustivité, mais c'est déjà pas mal. La majorité des mangas est pour l'instant en japonais, voire en anglais, mais une traduction en français serait semble t-il à l'ordre du jour d'ici la fin de l'année.

Tout ça est évidemment gratuit, et le business model de Manga Newspaper reste somme toute classique : de la publicité, des propositions de planches aux journaux et sites web, mais aussi... des communiqués de presse façon manga !

14 juin 2010

Père Google, raconte-nous une histoire...

Petit retour vers le futur sur un truc mijoté dans les alambics du Google Labs en décembre dernier : Google Living Story. Si le projet est arrêté depuis février, le concept est intéressant (à défaut d'être réellement convaincant) puisqu'il s'agit ni plus ni moins que d'une espèce d'agrégateur basé sur le contenu du Washington Post et du New York Times.


L'internaute choisit un sujet, et hop ! il se retrouve avec l'ensemble de la production journalistique (articles, éditos, vidéos, etc.) des deux illustres quotidiens, liens à l'appui. Une chronologie interactive est également à disposition. Détail intéressant : toutes les sources sont rassemblées sous une seule et même URL.

Evidemment, deux journaux, ça ne fait pas beaucoup, aussi pertinents soient-ils. Néanmoins,  l'idée de segmenter par sujet (même pas par thématique, par sujet) est intéressante, notamment pour un veilleur. Déjà parce que les informations sont déjà classées quand elles tombent (le rêve...), ensuite parce que tout ça peut constituer un dashboard pertinent pour celui qui l'utilise (avec un minimum de mise en page quand même, hein). D'autant que les sources sont aussi distinguées selon leur nature : News, opinion, vidéos...

Par contre pour les journaux, c'est comme d'hab', puisqu'avec le système d'URL unique, le lecteur n'est pas renvoyé vers l'article original...

Si j'utilise le présent et non le passé pour parler de Google Living Story, c'est tout simplement parce que le code source du machin est disponible ici.

13 juin 2010

L'Australie va avoir son Spot.us


L'Australie, qui est actuellement loin d'être un modèle en matière de liberté d'expression sur le web, accueillera (et la Toile par la même occasion, hein) le petit frère du site américain Spot.Us, ce site d'information dont le modèle économique repose sur le crowdfunding : les pigistes proposent, sur le site, un synopsis de reportage / enquête à réaliser. Si les lecteurs sont intéressés, ils financent l'enquête, qui est réalisée par des journalistes freelances puis ensuite vendue aux médias (presse écrite en premier lieu).

Spot.Us a été fondé fin 2008 par David Cohn, journaliste diplômé de l'université Columbia de New York ; YouCommNews, son jumeau australien, sera lancé en septembre prochain, le site étant toujours en cours de développement (mais néanmoins accessible). Il est supporté par la Public Journalism Interest Foundation de l'université de Swinburn, une organisation qui réfléchit aux nouveaux modèles de journalisme.

Et pourquoi pas tenter la même chose en France ? 

5 juin 2010

C'est l'été...

... et ce blog va changer de garde-robe : nouveau template un peu moins triste et élargissement des thématiques traitées (l'information à l'ère 2.0 en général, et plus seulement par l'angle de la presse).

Parce que n'empêche c'est vrai, Twitter, ça tue quand même un peu les blogs...

31 mai 2010

Rupert Murdoch est un T-Rex de papier

Robert Murdoch est un dinosaure des médias, ça on le savait déjà. Sa volonté de rendre payant le contenu des journaux composant son vaste empire médiatique passera une nouvelle étape le mois prochain : Après le New York Times, ce sera au tour du Times (et son édition du week-end, le Sunday Times) de passer au payant (et de changer d'url par la même occasion). 

Les nouveautés du site sont disponibles en avant-première et gratuitement pendant un mois avant que le cadenas ne soit posé, définitivement (ou pas ?).

Une perte estimée à 90 % du lectorat

Conséquence du passage au tout-payant : une étude du groupe News International (filiale de News Corporation, donc appartenant à Murdoch) estime que l'instauration d'un péage à l'entrée ferait perdre au journal... 90 % de son lectorat (sur 21 millions de visiteurs uniques mensuels) ! 

Il en coûtera ainsi 1 livre par jour ou 2 livres par semaine pour accéder aux contenus des deux journaux (et à des nouveaux trucs comme Times+... faut bien justifier le prix). A noter que cet accès sera gratuit pour les abonnés papier. En même temps, l'empire médiatique de Rupert Murdoch est sûrement le seul groupe au monde à avoir les reins assez solides pour se lancer dans une entreprise aussi risquée...

Car pas sûr que les annonceurs voient cette évolution (régression ?) d'un bon oeil. De plus, rien ne dit qu'une fois  l'effet de curiosité passé, les lecteurs ne se lassent et ne repartent vers une information gratuite (le Guardian, la BBC... sont toujours accessibles librement). Tout ça semble présager d'une victoire à la Pyrrhus face à Google, l'ennemi juré (bin oui, si le contenu sont protégés, ils ne seront plus indexés)...

Bas les masques !

Pour être précis, Murdoch est un dinosaure carnivore : il bouffe à grandes dents la concurrence et le paysage médiatique anglo-saxon, mais il attaque aussi la liberté d'expression : en ces temps de proposition de loi douteuse chez nous, le site sera conçu de manière à ce qu'il soit nécessaire de s'inscrire avec sa vraie identité pour oser pouvoir commenter sur le site.

Je vois  mal comment ce dernier point va pouvoir être mis en oeuvre : en fournissant son adresse IP peut-être ? Bref, le magnat de la presse (du siècle dernier) va sûrement se casser la gueule, et ce sera tant mieux (enfin espérons, car si l'idée marche, la concurrence risque de suivre...).

18 avr. 2010

On a perdu le Québec

Québec89, le petit-frère âgé de tout juste 6 mois de Rue89, c'est fini. Patrick Pierra (co-fondateur du site et éditeur du portail d'information québécois BRANCHEZ-VOUS !), avec qui Rue89 avait conclu un partenariat pour monter son homologue québécois), l'annonce dans le dernier article du pure player.

http://www.quebec89.com/non-classe/quebec89-apres-six-mois-la-fin-dune-belle-experience-2698.html

Les raisons sont claires : le manque de trafic (20 000 à 40 000 pages vues par mois, au lieu des 100 à 150 000 estimées), et donc par un ricochet une situation financière difficile, visiblement imputable à une déception des internautes, qui, lecteurs de Rue89, attendaient fortement du site. L'ombre du père a eu raison du fils.

Néanmoins, une rapide visite sur le site permet de constater que le rythme de parution des articles était très aléatoire (toujours mieux que ce blog cependant, heureusement pour eux) et que les sujets étaient loin d'être aussi originaux que ceux de rue89.  Un rythme un peu cahoteux lié à des moyens insuffisants (trois journalistes salariés, une poignée de pigistes, mais surtout... des contributeurs quasi-inexistants).

L'image du journal avait également été récemment entachée par une sombre histoire de RH, relayée sur la blogosphère canadienne et Twitter, et  selon certains n'aurait fait que précipiter une décision de rupture du côté de Rue89. 

Pour les lecteurs québécois, restent encore l'incontournable Cyberpresse, ainsi que Le Devoir ou Radio Canada pour ne citer qu'eux.

13 avr. 2010

Un site internet reçoit le prix Pulitzer

C'est une grande première : cette année, le prestigieux Prix Pulitzer (créé en 1904, et récompensant un large champ de domaines, dont le journalisme) a récompensé un site, ProPublica, pour son enquête au sein d'un centre médical de la Nouvelle-Orléans après le passage de l'ouragan Katrina en 2005. L'article a été rédigé en collaboration avec le New York Times Magazine.

Plus précisément, l'enquête s'attache à raconter le choix difficile des médecins d'euthanasier certains malades, qu'ils jugeaient impossibles à sauver après la catastrophe. Un sujet sensible traité avec brio par la journaliste Sheri Fink.

http://www.propublica.org/feature/the-deadly-choices-at-memorial-826
ProPublica est une rédaction américaine, indépendante et à but-non lucratif, tournée vers le journalisme d'investigation et "d'intérêt public". Créée en octobre 2007, elle emploie actuellement 32 journalistes. Le site Mediapart reprend régulièrement une partie de ses enquêtes.



A noter que c'est également un site internet (en l'occurrence la version web du San Francisco Chronicle) qui a remporté la catégorie "Dessins de presse".

4 mars 2010

Berlusconi VS Youtube, la blogosphère, le web, etc.


Demander une autorisation auprès du ministère des Communications pour diffuser des vidéos sur le web : telle est la volonté affichée d'un décret législatif déposé au Parlement en début d'année par Paolo Romani, secrétaire d'Etat aux Télécommunications.

Une demande qui deviendrait nécessaire pour toute diffusion ou distribution sur internet d' "images animées, accompagnées ou non de son" d'après le texte. Autant dire qu'il sera quasiment impossible de passer au travers des mailles du filet.

Une mesure prise encore une fois, pêle-mêle, au nom de la protection de l'enfance, de la protection des droits d'auteur, de la lutte contre la pornographie, de la sauvegarde des baleines bleues, etc. Mais une mesure qui attaque aussi directement la concurrence pleine de vitalité que représentent les web TV et les plate-formes vidéos pour Mediaset... premier groupe privé (et tentaculaire) de communication du pays, gouverné par Silvio Berlusconi.

Déjà, la condamnation de Google par le tribunal de Milan pour avoir retiré trop tardivement une vidéo montrant un mineur handicapé insulté et battu avait créé la polémique. Mais ce décret législatif constitue là une nouvelle étape vers un véritable contrôle du web.

Un décret qui trahit également une méconnaissance du web par les dirigeants italiens (ah bon ?) : imaginons que la mesure ne concerne que les sites hébergés en Italie ; dans ce cas, ceux-ci auraient tout intérêt à déménager leur hébergement à l'étranger (avec les revenus publicitaires qui vont avec). Et surtout, la loi ne pourrait que donner naissance à un horrible monstre bureaucratique...

Voir également la prise de position du quotidien Article 21 (en italien), média en ligne dédié à la défense de la liberté d'expression.

1 mars 2010

La BBC abandonne le format XXL

"La fin d'une ère d'expansion pour la BBC" titrait le Times vendredi : fermeture de deux radios numériques (6Music et Asian Network), de deux chaînes pour ados (BBC Switch et Blast1), limitation du budget visant à acquérir les droits des retransmissions sportives, réduction de moitié du site internet (et budget dédié amputé de 25 %)... et au final 600 licenciements (à noter que le site web emploie toute de même 1 400 personnes). Tout en sachant qu'en 2007, la BBC avait déjà procédé à quelques 1 800 licenciements.

Objectif de son directeur général, Mark Thompson : réaliser une économie d'environ 500 millions de dollars sur les 5 milliards et demi de fonds que reçoit annuellement la vénérable institution. Deux raisons à cette cure d'amaigrissement : la possible arrivée au pouvoir des conservateurs (aidés en cela par les multiples scandales ayant éclaboussés le gouvernement de Gordon Brown) qui entraînerait un gel de ses redevances (prélevées sur les foyers équipés d'une télévision), ainsi que sa position dominante dans le paysage médiatique anglais, jugée déloyale par bon nombre de ses concurrents.

Le plan, actuellement examiné par le BBC Trust (son conseil d'administration), sera rendu public le mois prochain. Les syndicats sont par contre déjà en ordre de bataille, prêts à défendre les salariés de la "Beep".

20 févr. 2010

Journaliste islandais, un métier d'avenir ?

Pendant que de par chez nous on s'évertue à vouloir contrôler le Net (Hadopi, Loppsi et, incessamment sous peu, ACTA), l'Islande, elle, prend le contrepied de la plupart des démocraties occidentales : L'Althing, le parlement islandais (et accessoirement le plus vieux parlement du monde) planche depuis mardi sur une proposition de loi visant à faire de l'île un paradis... pour la liberté d'expression, rien de moins.

Cette initiative, poussée par l'association Icelandic Modern Initiative (IMMI), qui lui a donné son nom, vise à renforcer la protection des sources, protéger les différents intermédiaires techniques intervenant dans le processus informationnel (FAI, serveurs de données...), mettre en place une charte sur la liberté d'information ou encore créer un prix du journalisme.

Un tel projet, s'il venait à se concrétiser, représenterait clairement une formidable opportunité pour relancer le journalisme d'investigation (voir à ce sujet l'initiative du Huffington  Post avec, depuis presque un an, son "Investigate Fund") et permettrait du même coup de contourner la pratique dite du "tourisme de diffamation", aberrance judiciaire totale et énorme frein à la liberté d'expression.

Loin de toute considération éthique, il faut bien saisir également qu'il s'agit ici d'une opportunité pour l'Islande, frappée de plein fouet par la crise économique, de redessiner les contours d'un nouveau modèle économique original (en plus les serveurs et l'électricité, là-bas, ne coûtent pas chers...)

Reste qu'en tant que postulante à l'Union Européenne, l'Islande risque de se retrouver dans une posture délicate vis-à-vis de Bruxelles, qui négocie actuellement le traité ACTA (qui prévoit la bunkerisation du droit d'auteur).

Wikileaks (l'un des principaux porte-parole du projet de loi islandais, et bien placé pour en défendre la nécessité...), la Quadrature du Net et Internet Sans Frontières (entre autres) ont déjà annoncé leur soutien au projet de loi.

11 janv. 2010

Débat sur l'identité journalistique



En tant que veilleur, j'ai plusieurs fois constaté une petite chose, certes anodine mais qui, à mon avis, veut dire beaucoup : pas mal de blogueurs n'écrivent pas des "billets" mais des "articles". D'ailleurs, tant qu'on y est, beaucoup d'entre eux intitulent leur blog "Le magazine de...", "Le journal de...".

Cette appropriation des termes journalistiques par des blogueurs m'avait toujours laissé un peu interrogateur. J'ai dit "journalistiques" parce que j'écarte volontairement les autres significations pour me concentrer sur le rapport journalistes / blogueurs, qui est l'un des thèmes de ce blog.

Pour une analyse sémantique plus poussée sur la question, allez donc lire le très bon billet de Pierre Mourotte sur le sujet.

Je m'en faisais la réflexion sur Twitter, et n'étant apparemment pas le seul, @cwmconsulting et moi avons donc eu l'idée de ce billet (article ?) commun sur le sujet, écrit de deux points de vue différents et complémentaires.

Sans avoir la prétention de régler le problème ou de ne dire que des choses intelligentes, je souhaitais donc faire part de quelques pistes de réflexion sur le sujet.

Le billet d'humeur

Il faut d'abord préciser que le terme "billet" employé pour désigner un contenu publié sur ce que l'on appelle un blog (je vais éviter de rentrer dans les définitions de chaque terme...) fait originellement référence au "billet", cette information courte, que l'on retrouve dans les... journaux.

Souvent, ce billet prend d'ailleurs la forme d'un coup de gueule, d'une prise de position, et peut s'étirer davantage en longueur (le billet d'humeur). Des journalistes comme Eric Fottorino ou Pierre Marcelle poussaient régulièrement leur gueulante au Monde ou à Libération.

Car c'est bien à ça que les blogs, ces "journaux" personnels (allez hop, on en rajoute une couche) sont originellement dédiés : raconter sa vie, donner son avis... D'où une certaine dérive narcissique, régulièrement dénoncée par les blogueurs eux-mêmes.

Vers un article d'humeur ?

Alors pourquoi ne pas garder ce terme de "billet" ? Est-ce un simple caprice ou cela correspond-il à un réajustement du terme à de nouveaux usages ? Voici mon hypothèse, version courte :

La presse vit une période difficile : son avenir est incertain, et surtout, son travail est régulièrement remis en cause, critiqué. Le temps de l'information verticale est révolu, le journaliste vacille de son piédestal : les nouvelles technologies ont en effet donné un important pouvoir de contrôle de l'information et d'expression (personnelle et collective) aux citoyens.

Ceux-ci concurrencent directement les journalistes traditionnels, ils se mettent à produire de l'information sous ses formes les plus diverses : billet de blog, vidéo, tweet... Ils sont partout, puisqu'il s'agit de vous et moi, qui sommes connectés, écrivons, commentons le monde qui nous entoure. Souvent, ils sont là où le journaliste n'est pas encore arrivé ; l'information va très vite, il faut savoir être sur tous les fronts à la fois.

Dans cette double perspective, avec d'un côté une profession en pleine redéfinition et de l'autre la montée en puissance de nouveaux acteurs, il est donc logique qu'un terme évolue pour s'adapter à l'objet qu'il désigne.

Tous journalistes ?

Donc, en employant le mot "article", le blogueur se considère de plus en plus comme un journaliste parce qu'il cherche, qualifie, recoupe l'information, écrit. De facto, beaucoup de blogueurs et de journalistes font la même chose. Pas tous, mais beaucoup. Parce que bon, écrire un "article", ça fait plus professionnel qu'écrire un "billet".

Pour autant, demander à l'Etat une part des subventions à la presse (voir le billet de Thierry Crouzet sur le sujet) parce que le blogueur participe de cet écosystème paraît un peu prématuré. Parce que journaliste, c'est quand même une profession, un vrai métier ; des gens qui ne font que ça et qui ont été formés à le faire.

Après, les blogueurs ont-ils raison d'utiliser le terme "article" ? Je ne sais pas.

En tout cas, en tant que veilleur, je continuerai à faire la distinction billet / article, ne serait-ce que parce que la réalité que ces deux termes recouvrent reste encore, à mon avis, très différente (un journal avec ses milliers de lecteurs, ses moyens et ses journalistes professionnels d'un côté, et un blog tenu par un individu, aussi brillant et intégré dans le web soit-il, de l'autre). Reste à savoir pour combien de temps !
 
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